Plus jamais cela ! Ni coupable, ni responsable.
Plus
Jamais cela ! Par Daniel ROUXEL
Un
témoignage pour faire avancer les Droits de l’enfant dans l’Europe de 2009.
Né sous secret le 2 avril 1943, à la maternité
de Port- Royal à Paris 14 ° d’une Mère française et d’un père allemand,
lieutenant de la WEHRMACHT
Je
fus confié à une maison maternelle pendant huit mois avant d’être placé dans
une famille d’accueil jusqu’à l’âge de quatre ans. Elevé à Pleine Fougère (35), en parfaite
harmonie avec Jacky, mon frère de lait, j’ai le souvenir d’avoir été heureux.
Devenus
trop vieux, mes grands-parents adoptifs ont demandé à ma mère de me retirer.
Celle-ci me plaça chez sa Mère. Ma Mère, travaillait comme cantinière au camp
militaire allemand de Pleurtuit (35) ; à la débâcle elle partit se faire
oublier à Paris. Elle ne pouvait s’occuper de moi et je ne la voyais
qu’épisodiquement une fois par an.
A
quatre ans, je fus donc déraciné, emmené chez cette dame que je ne connaissais
pas et qui était ma Grand-mère maternelle. Elle m’inscrit à l’école communale
de Mégrit (22) petit village de Bretagne de six cent habitants où tout le monde
connaissait tout sur tout le monde.
Très
vite, regardé comme un étranger et une bête curieuse, j’appris mes origines.
Dans
les villages où l’électricité n’était
pas encore dans toutes les maisons, les soirées étaient occupées par des
veillées devant des bolées de cidre à manger des châtaignes grillées au feu de
bois. Les langues allaient bon train sur chaque personne du village. Très vite
ma grand-mère, ma mère absente et moi devînmes le centre d’attraction de ce
village.
Il
était de mauvaises mœurs d’être l’enfant d’une fille-mère et de surcroît le
fils d’un boche, donc de l’ennemi. On me le fit payer très cher. Enfants et
adolescents ne sont pas tendres entre eux et encore moins avec ceux qui n’ont
pour se défendre que la honte et les larmes.
Les
lendemains à l’école, les autres gamins connaissaient mes origines et les
insultes allaient bon train. La douleur provoquée par les mots « fils de boche
et de putain » étaient du velours par rapport à celle que me causèrent les
adultes. L’instituteur, le curé, certaines personnes du village, tous se
moquèrent cruellement sans oublier cet ignoble adjoint au maire qui un dimanche
à la sortie de l’église demanda que je m’approche de lui. Par méchanceté,
vanité et bêtise conjuguées, il posa cette question aux villageois « Savez-vous
qu’elle différence il y a entre un fils de boche et une hirondelle ? » Personne n’avait l’air de savoir ! ………. « Une
hirondelle quand elle fait ses petits en France et qu’elle repart, elle les
emmène, alors qu’un boche les laisse sur place ». Les pleurs et la honte
m’envahirent au point de vouloir me suicider, je devais avoir cinq à six ans.
Je
ne rentrerai pas dans les détails les plus vils que ses braves campagnards
employaient pour m’humilier ou me punir ! Mais de quoi ? J’étais un fils de
boche et cela suffisait à jeter sur moi l’opprobre et la haine. Même ma
grand-mère prenait fait et cause pour eux car elle aussi rougissait de cette
situation. Elle m’enfermait plut facilement dans le poulailler pour dormir la
nuit, qu’elle ne m’embrassait. Elle avait horreur que je la lèche, comme elle
disait. Les « raclées », pas toujours justifiées me tombaient souvent
dessus. Le tutoiement était interdit, j’ai toujours vouvoyé ma grand-mère.
Elle
aussi avait ses excuses, fille de l’assistance publique, ne sachant ni lire ni
écrire, elle avait perdu son mari des suites des gaz lors de la guerre 14-18.
J’ai
toujours pensé être un « accident de la guerre », plus tard, dans les dernières
années de vie de ma mère, nous avons beaucoup parlé. Je sais depuis que je suis un enfant né de l’amour rendu
impossible par la guerre. La réalité de ma double origine, française et
allemande est tout autre que l’indignité tant dénoncée, elle est au contraire
la substance même de ce qu’il y a de plus noble et beau, le fruit de l’amour au
sein de la guerre signifiant ainsi à celle-ci qu’elle n’a pas le dernier mot.
Quoi de plus encourageant pour les générations futures ?
Mon père est décédé à la débâcle, j’avais
deux ans, il m’a pris dans ses bras, m’a donné le biberon et à écrit à sa
famille, avant qu’il ne soit tué, qu’il avait un enfant en France. Sa
famille voulait faire le nécessaire pour
que je sois élevé en Allemagne, ma mère s’y est refusée. A douze ans je fis la
connaissance de ma famille allemande, je reçus un accueil chaleureux, nos
relations sont excellentes.
Pour Conclure
Ce
qui est le plus terrible chez un enfant, ce n'est pas de savoir qu'il n'est pas
aimé, et pourtant c'est important,……… mais c’est de ne pouvoir aimer parce ce noble sentiment est rejeté des autres.
Puisse
mon histoire à travers celle de mes parents inscrite dans l’Histoire balayer
les préjugés indignes des droits de l’Homme et les malveillances immondes quant
à ceux de l’Enfant ! Si on renie son
histoire, on ne prépare pas son avenir".
Daniel ROUXEL Tél :02 72 35 15 00
Port :06 07 49 24 27 - daniel.rouxel@aliceadsl.fr Le Mans F.72100 Contact association : www.coeurssansfrontieres.com